Kaïdin Monique le Houelleur
Née au Vietnam. Après avoir exposé ses premières sculptures d’acier en Côte d’Ivoire, en 1977, elle se lance dans la sculpture sur marbre à partir des années 80 sous la houlette d’Isamu Noguchi. En 1995, elle s’essaye à la création en extérieur au cours d’un voyage dans le désert africain, et publie un album photos intitulé : « De sable, d’eau et de sel ». Avec son « Symbol of Life » pour l’Exposition Universelle d’Hanovre en 2000, ses activités se sont étendues au monde entier. Elle envisage d’entreprendre, durant l’automne 2008, une tournée après son exposition à Tôkyô sous le titre « Sur les traces de La sente étroite du bout du monde de Bashô ».
Votre activité artistique rayonne dans le monde entier, mais vous êtes basée en Afrique ?
Vivant en Afrique depuis ma plus tendre enfance, j’ai été profondément touchée par la nature, la culture et la vie quotidienne des peuples de ce continent. Actuellement, j’habite en Côte d’Ivoire où j’ai installé mon atelier, et, tout en passant la moitié de l’année à Paris, je me consacre à la sculpture et aux œuvres d’installation.
On peut voir une de vos créations ici même, dans le Parc Hotel de Tôkyô ?
Effectivement, lorsque l’on m’a chargée de m’occuper de l’intérieur de cet hôtel, j’ai eu l’idée, afin de répondre le mieux au concept d’ « espace de détente et de nature », d’évoquer cette dernière en utilisant le tapa, une étoffe obtenue à partir de l’écorce d’un arbre et que l’on utilise également pour les vêtements. L’œuvre a vu le jour dans mon atelier où l’on entend le chant des oiseaux et duquel on peut voir les feuilles des arbres choir. Ce qui est fantastique est que cette œuvre dans laquelle bat le cœur de la nature africaine ait parcourue une si longue distance pour se retrouver dans un hôtel moderne de Tôkyô. Les voyages nous gratifient de nombreuses rencontres et découvertes.
Il semble que vous allez continuer votre voyage entrepris l’année dernière sur les traces de Matsuo Bashô et « La sente étroite du bout du monde ».
C’est au cours de mes séjours au Japon que j’ai connu le poète Matsuo Bashô. A une époque où la marche à pied était le mode de locomotion principal, Bashô a entreprit un périple au cours duquel il a tenté, à l’aide de mots simples, de fixer de brefs instants pour l’éternité. J’ai été touchée par cette démarche dans laquelle je perçois des points communs avec mes thèmes de composition. Jusqu’à présent, j’ai voyagé dans les déserts et les forêts primaires d’Afrique où j’ai pratiqué l’installation in situ. J’ai ainsi eu l’occasion, à de nombreuses reprises, de constater combien les trésors de la nature étaient ruinés par la destruction des forêts, la pollution ou encore l’assèchement des cours d’eau. Cette nature qui nous semble inépuisable est en fait bien fragile. Mon souhait le plus cher est, à travers mes œuvres, de pouvoir faire prendre conscience de cette réalité à tout un chacun.
Quel hôtel vous a particulièrement marqué au cours de vos voyages ?
J’ai adoré l’hôtel en terre dans lequel j’ai séjourné au cœur du désert africain. Il a été entièrement construit avec la terre qui se trouve aux alentours. Pour un citadin, il ne s’agit peut-être pas d’un bâtiment au sens où on l’entend d’ordinaire. Mais il était très frais et agréable à vivre car les épais murs de terre protègent de la chaleur extérieure et les fenêtres sont placées de manière à ce que l’air circule. Voilà un exemple d’harmonie avec l’environnement, permise par un espace conçu en adéquation avec la nature. Ne serait-ce pas cela, finalement, le luxe ultime ?